THEOPHILE GAUTIER ET SA MUSE, LA BALLERINE CARLOTTA

 

 


 

 

 

 

Théophile Gautier, né à Tarbes en 1811, est un poète, romancier et critique d’art français.
Il rencontre en 1829 celui qui allait devenir son « maître » en littérature : Victor Hugo et il publie en en 1831-1832 ses premières poésies qui passent inaperçues mais il se distingue de ses amis romantiques par ses préoccupations formalistes fustigeant les visions moralistes ou utilitaires de la littérature dans la célèbre préface à son roman épistolaire Mademoiselle de Maupinn (1835). Il écrit aussi ses premières nouvelles comme La Cafetière (1831), dans une veine fantastique qu’il approfondira par la suite.
En 1840, Théophile Gautier se rend au théâtre de la Renaissance à Paris où se produit la ballerine Carlotta Grisi.
Il tombe amoureux, elle devient sa muse et il lui vouera toute sa vie une admiration et une fidélité sentimentale sans faille. Tout le séduit chez elle ; outre son talent, il vante ses autres qualités : « son teint est d’une fraîcheur si pure, qu’elle n’a jamais mis d’autre fard que son émotion ».
Toujours est-il qu’il semble qu’un séjour à Londres, en 1842 (pour la première de Giselle), ait permis à Gautier et Carlotta de vivre leur passion, malgré la présence de Perrot (son amant d’alors) Celui-ci reste d’ailleurs en Angleterre, tandis que Carlotta rentre à Paris avec Théophile Gautier, et finit par quitter l’appartement de Perrot pour regagner la demeure maternelle, où elle retrouve également sa soeur Ernesta . Peu après, les journaux évoquent un projet de mariage de Carlotta avec son partenaire Petipa ; Carlotta se fait à nouveau appeler par son nom de jeune fille. A ce moment, Gautier fréquente assidûment le foyer de l’Opéra, et ses entrevues avec Carlotta sont fréquentes mais clandestines.

Mais peu après, il semble alors avoir reporté son sentiment contrarié sur la cantatrice Ernesta Grisi (avec laquelle il aura deux filles), sœur aînée de Carlotta. Il se met en ménage avec Ernersta en 184414, afin de toujours figurer dans l’entourage familial de la danseuse. Même s’ils furent amants un temps, sa passion pour la ballerine recevra peu d’encouragements ; alors déjà à un âge avancé pour l’époque, quand Carlotta lui dit qu’elle l’ « aime bien », il lui répond : « Que faut-il faire pour gagner tout à fait votre cœur. Quelle parole dire, quel philtre employer ? Il y a si longtemps que je vous aime ! N’attendez pas que je sois mort pour avoir pitié de moi… laissez-moi me figurer que je vous tiens entre mes bras contre mon cœur que j’aspire votre âme sur vos lèvres et que vous ne refusez pas la mienne » .







A une robe rose

Théophile Gautier
Que tu me plais dans cette robe
Qui te déshabille si bien,
Faisant jaillir ta gorge en globe,
Montrant tout nu ton bras païen !


Frêle comme une aile d’abeille,
Frais comme un cœur de rose-thé,
Son tissu, caresse vermeille,
Voltige autour de ta beauté.


De l’épiderme sur la soie
Glissent des frissons argentés,
Et l’étoffe à la chair renvoie
Ses éclairs roses reflétés.


D’où te vient cette robe étrange
Qui semble faite de ta chair,
Trame vivante qui mélange
Avec ta peau son rose clair ?


Est-ce à la rougeur de l’aurore,
A la coquille de Vénus,
Au bouton de sein près d’éclore,
Que sont pris ces tons inconnus ?


Ou bien l’étoffe est-elle teinte
Dans les roses de ta pudeur ?
Non ; vingt fois modelée et peinte,
Ta forme connaît sa splendeur.


Jetant le voile qui te pèse,
Réalité que l’art rêva,
Comme la princesse Borghèse
Tu poserais pour Casanova.


Et ces plis roses sont les lèvres
De mes désirs inapaisés,
Mettant au corps dont tu les sèvres
Une tunique de baisers.


Théophile Gautier, La comédie de la mort





Le Poème de la Femme (Marbre de Paros)



Un jour, au doux rêveur qui l’aime,
En train de montrer ses trésors,
Elle voulut lire un poème,
Le poème de son beau corps.


D’abord, superbe et triomphante
Elle vint en grand apparat,
Traînant avec des airs d’infante
Un flot de velours nacarat:


Telle qu’au rebord de sa loge
Elle brille aux Italiens,
Ecoutant passer son éloge
Dans les chants des musiciens.


Ensuite, en sa verve d’artiste,
Laissant tomber l’épais velours,
Dans un nuage de batiste
Elle ébaucha ses fiers contours.


Glissant de l’épaule à la hanche,
La chemise aux plis nonchalants,
Comme une tourterelle blanche
Vint s’abattre sur ses pieds blancs...



Théophile Gautier




 ./...

Pour Apelle ou pour Cléomène,
Elle semblait, marbre de chair,
En Vénus Anadyomène
Poser nue au bord de la mer.


De grosses perles de Venise
Roulaient au lieu de gouttes d’eau,
Grains laiteux qu’un rayon irise,
Sur le frais satin de sa peau.


Oh! quelles ravissantes choses,
Dans sa divine nudité,
Avec les strophes de ses poses,
Chantait cet hymne de beauté !


Comme les flots baisant le sable
Sous la lune aux tremblants rayons,
Sa grâce était intarissable
En molles ondulations.


Mais bientôt, lasse d’art antique,
De Phidias et de Vénus,
Dans une autre stance plastique
Elle groupe ses charmes nus.

Sur un tapis de Cachemire,

C’est la sultane du sérail,
Riant au miroir qui l’admire
Avec un rire de corail ...


Théophile Gautier





./... 
La Géorgienne indolente,
Avec son souple narguilhé,
Etalant sa hanche opulente,
Un pied sous l’autre replié.


Et comme l’odalisque d’Ingres,
De ses reins cambrant les rondeurs
En dépit des vertus malingres,
En dépit des maigres pudeurs !


Paresseuse odalisque, arrière !
Voici le tableau dans son jour,
Le diamant dans sa lumière ;
Voici la beauté dans l’amour !


Sa tête penche et se renverse
Haletante, dressant les seins,
Aux bras du rêve qui la berce,
Elle tombe sur ses coussins.


Ses paupières battent des ailes
Sur leurs globes d’argent bruni,
Et l’on voit monter ses prunelles
Dans la nacre de l’infini.


D’un linceul de point d’Angleterre
Que l’on recouvre sa beauté :
L’extase l’a prise à la terre;
Elle est morte de volupté ! ...


 Théophile Gautier


./...

Que les violettes de Parme,
Au lieu des tristes fleurs des morts
Où chaque perle est une larme,
Pleurent en bouquets sur son corps !


Et que mollement on la pose
Sur son lit, tombeau blanc et doux,
Où le poète, à la nuit close,
Ira prier à deux genoux.


Théophile Gautier



Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

ROMAIN GARY ET SON AMOUR IMPOSSIBLE, ILONA GESMAY.

PAUL ET NUSCH ELUARD, UN AMOUR TRES LIBRE

CHARLES BAUDELAIRE ET SES MUSES, JEANNE, APOLLINIE et MARIE